La 5ᵉ édition du Cyber Africa Forum s’est achevée à Cotonou, après deux jours intenses de débats, de rencontres, d’un hackathon et de présentations de solutions business. Mais au fil des échanges informels, des discussions autour d’un café ou d’un verre, une question revenait sans cesse : quelle est la réelle perception de la cybersécurité chez les acteurs privés ? Où sont les entreprises qui manipulent quotidiennement des volumes massifs de données ? Les décideurs des organisations, des banques, des sociétés privées, sont-ils véritablement présents et engagés ? Sont-ils conscients de l’urgence et des enjeux, ou la cybersécurité reste-t-elle pour eux un sujet technique, réservé à quelques spécialistes ?

Dans un contexte où les menaces numériques se multiplient et évoluent sans cesse, la cybersécurité et la veille stratégique ne peuvent plus être dissociées. Comment, dès lors, articuler efficacement ces deux démarches pour anticiper les risques, protéger ses actifs et garantir la compétitivité de son organisation ? Dans ce billet, je vais m’atteler à faire un tour d’horizon des bonnes pratiques, m’appuyer sur des exemples concrets pour expliquer l’urgence de la question et avec des pistes de formation, essayer d’aider les PME et les organisations de toute sorte à renforcer leur posture de sécurité tout en développant une véritable culture de l’intelligence stratégique.

Pourquoi articuler cybersécurité et veille stratégique ?

La cybersécurité vise à protéger les systèmes d’information et les données contre les menaces (malwares, ransomwares, phishing, etc.), tandis que la veille stratégique permet d’anticiper les évolutions du marché, les mouvements de la concurrence et les risques émergents.

L’articulation des deux permet :

Exemples concrets d’articulation

  1. Veille sur les vulnérabilités et adaptation des défenses

En 2023, la découverte du logiciel espion Predator a mobilisé les équipes de cybersécurité et de veille stratégique. Les informations collectées sur les indicateurs de compromission (IOCs) ont permis d’ajuster les politiques de sécurité et de sensibiliser les collaborateurs de plusieurs entreprises et organisations et gouvernements aux nouvelles méthodes d’attaque.

  1. Surveillance du dark web et protection des actifs stratégiques

Des PME françaises ont évité des fuites massives de données clients grâce à une veille active sur les forums du dark web, identifiant des bases de données volées avant leur exploitation malveillante. Cette anticipation a permis d’alerter les clients et de renforcer les mesures de protection.

  1. Réaction rapide face à une cyberattaque

Selon une étude, près de 60% des PME victimes de cyberattaques cessent leurs activités dans les six mois. En associant veille stratégique (analyse des menaces sectorielles, benchmark concurrentiel) et cybersécurité (plans de réponse, tests de crise), certaines entreprises ont pu limiter l’impact des attaques et assurer la continuité de leurs opérations.

Comment mettre en place une démarche intégrée ?

  1. Auditer et cartographier ses actifs stratégiques
  • Identifier les données sensibles : clients, fournisseurs, savoir-faire, brevets, documentations techniques etc.
  • Evaluer la maturité des systèmes d’information et les failles potentielles.
  1. Structurer la veille
  • Utiliser des sources fiables (bjCSIRT, CNIN(Bj), ANSSI(Fr), CERT, Threatpost, The Hacker News, Google Threat Intelligence, SANS ISC, etc.) pour suivre l’actualité des menaces et des vulnérabilités.
  • Organiser la veille à trois niveaux : opérationnel (alertes, IOCs), tactique (techniques d’attaque, outils), stratégique (réglementation, géopolitique).
  1. Former et sensibiliser les équipes
  • Mettre en place des formations adaptées, des ateliers immersifs et des simulations d’attaque pour transformer chaque collaborateur en acteur de la sécurité.
  • Des dispositifs comme ceux proposés par AFNOR ou OpenClassrooms permettent de débuter gratuitement ou à moindre coût.
  1. Tester et réviser régulièrement
  • Réaliser des exercices de crise pour tester la capacité de réaction.
  • Mettre à jour les plans de sécurité et de veille en fonction des retours d’expérience et des nouvelles menaces.

Articuler cybersécurité et veille stratégique n’est plus une option, mais une nécessité pour toute organisation souhaitant survivre et prospérer dans un environnement numérique incertain. Les PME et les organisations ont tout intérêt à investir dans la formation, à structurer leur veille et à s’appuyer sur des solutions adaptées pour se protéger et saisir les opportunités. La montée en compétences collective est la clé d’une résilience durable et d’une croissance maîtrisée.